La Clarté-Dieu : le second amour d’un ébéniste périgourdin
J’ai eu deux coup de foudre dans me vie, à trente-cinq ans de distance. Le premier pour ma femme, le second pour la Clarté-Dieu.
Patrick Moussette est un homme de passion mais de passion partagée.
Tangible est la connivence qui l’unit à Julita, son épouse, sculpteur d’origine polonaise tout comme est tangible l’attachement de cette dernière pour cette abbaye cistercienne, « cachée au fond d’un vallon solitaire, quelque part à côté de Saint-Paterne-Racan », expliquent les guides spécialisés.
Ce n’est pas qu’une image. L’abbaye de la Clarté-Dieu, Patrick et Julita l’ont découverte petit à petit, au hasard de débroussaillages qui ont duré quatre ans et demi et qui leur ont permis de découvrir les vestiges d’un cloître, les limites d’un étang creusé par les moines.
Une histoire d’amour, une histoire fortuite aussi : « nous avons vécu quinze ans à Château-du-Loir. Notre propriété étant devenue trop petite pour abriter l’atelier de sculpture de ma femme et mon propre atelier d’ébéniste restaurateur, nous nous sommes mis en quête d’une ferme spacieuse mais banale…et puis on est tombé sur la Clarté-Dieu et on a dit oui…sans réfléchir ».
Sans réfléchir : il fallait en effet être un peu fou pour prendre à sa charge ces bâtiments superbes mais immenses ; harmonieux mais fragile.
« L’édifice est bâti sur un réseau d’anciennes carrières d’extraction de pierres. A la Révolution, la Clarté-Dieu est devenue une ferme. Elle est sortie des mémoires. Inhabitée, elle a été pillée par les uns et par les autres ce qui a contribué à la fragiliser ». Le temps aussi a fait son œuvre. « L’humidité a pourri le réfectoire ; la charpente est sur le point de s’effondrer ».
Un constat qui en aurait effrayé plus d’un, mais en matière de rénovation du patrimoine, Patrick et Julita Moussette avaient déjà une petite expérience.
« Il y a quelques dizaines d’années, en Dordogne, nous avions acheté une maison forte. Un bâtiment qui avait dû appartenir à un petit seigneur local au retour des guerres d’Italie. C’est là-bas que nous avons appris à manier la truelle, à faire de la chaux, à rénover l’électricité ».
Bâtie sur un site de 3,40 ha, la Clarté-Dieu est d’une toute autre envergure. « C’est vrai, mais ce qui frappe surtout, ce à quoi nous avons été tout de suite sensibles, c’est sa dimension spirituelle » confie l’ébéniste.
« C’est la dernière fille de Cîteaux, la dernière abbaye à avoir été fondée directement par la Maison-mère. Par la suite, l’ordre a essaimé un peu partout en Europe » acquiesce son épouse.
Un patrimoine à sauvegarder ; une filiation à préserver. « Dans la mesure de nos moyens, nous luttons contre son anéantissement. Nous sommes parvenus à restaurer une de ses salles mais c’est une goutte d’eau dans la mer ».
La décision récente du ministère de la culture d’inscrire à l’inventaire supplémentaire des monuments historiques l’ensemble des bâtiments encore existants ainsi que les trois hectares qui les entourent a conforté les propriétaires dans leur combat contre l’oubli.
« Nous ne sommes pas seuls, l’association des Amis de la Clarté-Dieu compte quatre-vingts personnes. Des projets – concerts, expositions – sont à l’étude » et puis, on l’a dit, la rencontre entre les époux Moussette et l’abbaye fut un coup de foudre et on sait que l’amour, comme Dieu, peut faire des miracles !
L’abbaye se visite toute l’année sur rendez-vous. Tel. : 02 47 29 39 91
Article paru dans la Nouvelle République, le 22 novembre 2006
Nous espérons chroniquer ce site prometteur dès que nous y serons allés. En attendant, si certains le connaissent, n’hésitez pas à nous donner votre sentiment, nous le publierons. Promis !